La Chasse
- cinebafilms
- 8 avr. 2022
- 5 min de lecture


La Chasse est le huitième long-métrage réalisé en 2012 par le danois Thomas Vinterberg. Il raconte l’histoire d’un instituteur qui se retrouve accusé d’abus et d’agressions sexuels sur des enfants. Abandonné par ses amis et ses proches, une longue descente aux enfers commence alors.
Bonne lecture ! (Attention spoilers)
UN HOMME AUX MULTIPLES FACETTES
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Lucas est le personnage principal de La Chasse incarné par Mads Mikkelsen. D’un point de vue professionnel, il est instituteur au sein d’une école modeste d’une petite ville danoise typique. D’un point de vue personnel, ses casquettes se multiplient. Il est père d’un adolescent, il est divorcé et amant, c’est également un chasseur et un ami respecté. Sa vie est présentée morceau par morceau, facette après facette.
On découvre essentiellement Lucas sous sa facette de professeur. Il est un instituteur très proche des enfants avec lesquels il ne rechigne pas à donner de sa personne pour sa profession, à jouer avec eux, à les aider à s’épanouir, à les raccompagner chez leurs parents quand il le faut.

Puis, au fur et à mesure du film, on complète son identité en étayant les morceaux qui composent sa vie. On apprend à connaître sa bande d’amis avec lesquels il partage des moments de joie et de sympathie. On découvre ses problèmes familiaux au cours desquels il lutte avec son ex-femme afin de pouvoir voir plus souvent son fils. Puis on le découvre en tant qu’amant alors qu’il entame une nouvelle relation avec une de ses collègues de l’école.

Un jour, il est accusé d’agressions et d’attouchements sexuels sur Klara, une de ses élèves. À la suite de ces accusations, Lucas le chasseur devient le chassé. Toute la ville ou presque le chasse. Il est devenu un gibier à abattre. Il est isolé, de ses amis les plus proches à sa nouvelle compagne, tout le monde le rejette et cherche à lui faire payer ses actes.

Quand il comprend qu’il ne parviendra pas à prouver son innocence, il décide de se venger contre ceux qui l’ont trahi. Alors, Lucas, qui jusque là était un instituteur serviable et discret, se transforme en un homme déterminé et charismatique qui va se venger de ce qu’il a subi.
LA DIFFICILE APPROCHE DES PROBLÈMES LIÉS À L’ENFANCE
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Lucas est un instituteur proche des enfants et notamment de Klara, une de ses élèves qui est également la fille de Théo, le meilleur ami de Lucas. Il est comme un second père pour Klara : il s’occupe de son instruction bien sûr mais se charge également de l’amener à l’école, de la garder, de lui faire faire des activités, tel que promener son chien. Il a accès au foyer de la famille de Klara. C’est une personne en qui Théo et son épouse Agnès ont une profonde confiance.

Or un jour, Klara adopte un comportement ambigu à l’encontre de Lucas. Tout d’abord elle lui offre un cœur qui était censé être destiné à un camarade de classe. Lucas essaie de lui faire comprendre que son comportement est inapproprié. En vain, puisque Klara va récidiver en embrassant Lucas sur les lèvres. Il est alors extrêmement embarrassé par l’attitude de Klara qui ne semble pas réaliser la gravité de ses actes.
Suite à cet incident, Lucas va tomber de très haut lorsque la directrice de l’école où il enseigne l’informe qu’un enfant l’accuse d’agressions et d’attouchements sexuels. En se basant uniquement sur un témoignage d’enfant, sa vie s’effondre. De son travail à ses amis, en passant par sa compagne, Lucas se retrouve isolé et méprisé de tous. Il va même être chassé de tous les endroits où il se rend, que ce soit l’école, ou encore l’épicerie de la ville. Il va même être attaqué dans sa maison. Preuve que la haine à son égard est totale, son chien sera même tué.

La Chasse soulève la question des rapports difficiles entre adultes et enfants et également la difficulté de prouver la véracité de la parole des enfants. En effet, à aucun moment, les mots de Klara ne sont remis en cause. Sa parole est sacrée et tout le monde la croit. Ce sont les adultes qui tombent dans une naïveté quasi enfantine, qui perdent tout sens critique avec pour conséquence de briser la vie d’un homme sur la base d’un seul témoignage, aussi terrible que son témoignage puisse être.
Il critique également la prédominance de la justice populaire sur la véritable justice. On assiste à la mise à l’écart, à l’agression et à l’ostracisation de Lucas par la société, en s’appuyant sur un témoignage d’enfant. De plus, cette justice populaire ne s’arrête pas même lorsque vraie justice a été rendue. Alors que Klara a confessé avoir menti, Lucas est toujours menacé et chassé comme le montre la scène finale se passant un an après les faits, dans laquelle il est pris volontairement pour cible par un chasseur, signe qu’il ne sera plus jamais en paix.
UNE RÉALISATION CONTEMPLATIVE
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Thomas Vinterberg a opté pour un travail discret. Il a utilisé la caméra pour son objectif premier : filmer. Il n’a pas cherché à transcender son outil pour en faire un objet qui participe activement au film mais a préféré qu’elle reste objective. Il a fait de sa réalisation une réalisation minimaliste.
Ce minimalisme se ressent au travers de l’écriture. Il n’y a qu’un seul personnage principal : Lucas. Dans sa vie, il est seul. Il est divorcé et ne vit pas avec son fils. Alors qu’il pense avoir retrouvé l’amour, il en est privé à cause des accusations dont il est victime. Plus tard, son fils le rejoint mais Lucas est très vite emmené par la police. Il ne parvient pas à reconstruire sa vie. Un événement vient toujours le perturber. Concernant les lieux du film, il s’agit également d’une petite ville modeste dans laquelle tout le monde se connaît et se côtoie. Il ne peut pas se fondre dans la masse, et finit toujours par ressurgir.

Le minimalisme se transforme en absence lorsque l’on s’attarde sur la musique. Il n’y a en effet aucun thème musical et aucune musique pendant tout le film à une exception qui intervient à la fin du film. Effectivement, la conclusion du film est accompagné d’un air de piano, ce qui détonne avec l’ambiance que le film avait établie jusqu’alors.

Grâce à ce choix d’une réalisation minimaliste et discrète, menée non pas par simplisme mais par talent, on peut qualifier le travail de Vinterberg comme un travail contemplatif. Il laisse les éléments qu’il a utilisés s’imbriquer et se sublimer, et les filme en se mettant en retrait.
En écrivant et en réalisant La Chasse, Thomas Vinterberg délivre un film puissant et captivant avec un message profond couplé à un Mads Mikkelsen charismatique.
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