Comancheria
- cinebafilms
- 22 avr. 2022
- 4 min de lecture


Comancheria est un film réalisé par David Mackenzie en 2016 dans lequel on suit deux frères braquant des banques afin de payer leurs dettes et celles de leur famille ainsi que deux rangers se mettant à leurs trousses.
Bonne lecture ! (Attention spoilers)
UNE HISTOIRE DE DUALITÉS
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Comancheria est un film structuré par de multiples dualités.

La première concerne les personnages principaux : Tanner et Toby Howard. Tanner est l’ainé, incarné par Ben Foster et Toby est le benjamin incarné par Chris Pine. Bien qu’ils soient frères, ils ont une personnalité radicalement différente. Tanner est solitaire, impulsif, violent tandis que Toby est dédié à sa famille, posé et calme. Pourtant, ils vont s’associer afin de braquer plusieurs banques pour en récolter les fonds de caisse.

Face à eux se dressent Marcus Hamilton et Alberto Parker, deux rangers joués par Jeff Bridges et Gil Birmingham qui enquêtent sur ces braquages et tentent de les arrêter. Marcus est un ranger expérimenté proche de la retraite tandis qu’Alberto est plus jeune et plus proactif.
Ce sont déjà deux dualités que nous avons décrites mais il y en a encore d’autres. Tout d’abord il y a l’affrontement entre les braqueurs et les rangers. Les deux frères vont de banque en banque, en dépouillant les caisses, de façon plutôt amateure, parfois même de façon impulsive. Alors que les rangers sont sur leurs traces en essayant d’anticiper leurs futures cibles. C’est ce duel à distance qui structure le film et qui fait monter la tension. On a d’une part un duo imprévisible qui est de plus en plus déterminé et violent et on a d’autre part un duo fébrile qui s’évertue à anticiper les actions à venir.

Il y a d’autres dualités qui concernent le message que le film porte que nous évoquerons plus en détail par la suite.
L’AMÉRIQUE DANS TOUTE SA SPLENDEUR
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Dans Comancheria, on suit Toby et Tanner Howard, deux frères vivant au coeur de l’Amérique profonde, dans les grandes plaines qui traversent le pays. À cheval entre le Texas et l’Oklahoma, les frères Howards arpentent les routes désertiques à la recherche de leur prochaine cible à dévaliser.

Dans leur déambulation, on découvre la vie texane (ou ce qu’il en reste) dans une vision des plus clichées. Ils vivent à dans un ranch au milieu des champs de pétrole à l’écart de la ville, ville qui est elle-même très pauvre et désertée. L’environnement extérieur est désertique ce qui accentue la désolation dans laquelle se trouvent les personnages.
Le cliché de la vie texane est accentué par les tenues vestimentaires tels des cow-boys des temps modernes s’exprimant avec un fort accent. Tous ces éléments posent les bases pour un film engagé et permettent une meilleure immersion.

Concernant les lieux dans lesquels se passe l’action, ils sont caractéristiques de l’image renvoyée par le Texas et plus généralement par les États-Unis. Nous les avons évoquées précédemment, les villes dans lesquelles la fratrie exerce ses méfaits sont typiquement américaines. Ils fréquentent des restaurants typiquement américains et blanchissent leurs argents dans des casinos, symbole reconnu de la culture étasunienne.

Toutes ces pérégrinations sont évidemment accompagnées d’une musique typique de far-west qui mettent en perspective le duel entre les brigands et les shérifs. La musique est hâchée par les armes qui fument et les balles qui fusent puisqu'on assiste à de nombreuses fusillades et échanges de tirs.
UNE CRITIQUE SOUS-JACENTE AU FIL CONDUCTEUR DU FILM
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On peut croire au premier abord qu’il s’agit d’un simple western moderne dans lequel les gentils shérifs chassent les méchants braqueurs : une sorte d’affrontement entre cow-boys et renégats dans lequel les renégats n’ont que pour motivation l’argent et les cow-boys sont les garants ultimes de la sécurité de la région. Nous verrons que cette vision primaire s’affine et se développe au fur et à mesure que le film progresse.
Il est cependant nécessaire de se pencher initialement sur les titres du film. En effet, nous évoquons les titres car le titre original est différent du titre français. Mais ils apportent tous les deux d’importantes informations nécessaires pour comprendre le fond du film.
En version originale, le film est nommé “Hell or High Water” tandis qu’en français c’est “Comancheria”. Ces deux appellations appuient deux critiques développées pendant le film.
Tout d’abord, Hell or High water est une expression faisant référence à une clause inscrite dans les contrats américains qui stipulent que peu importent les difficultés rencontrées (l’enfer ou le déluge), le contrat doit être honoré.
Cette expression appuie le message transmis par le film, à savoir la critique du système bancaire et de ses conséquences sur la ruine des personnes et des territoires dans lesquels il prend pied.

Ensuite, Comancheria fait référence à une région ancienne située entre le Texas et l’Oklahoma. Cette région fut un carrefour entre les populations amérindiennes comanches, les populations hispaniques et les populations texanes. Elle fut également une région d’affrontement entre ces populations notamment entre les occidentaux et les indigènes.
Dans le film, ce territoire est à nouveau un champ de bataille entre deux mondes. C’est l’affrontement entre la population et le système bancaire. L’argent rase tout sur son passage, sans prendre en compte la détresse humaine qu’elle entraîne.

Ces deux messages sont plutôt implicites. On parvient à les saisir au détour de conversations entre les personnages, par la mise en scène et les décoras choisis, ou encore par le déroulé du scénario. Comancheria s’inscrit dans la lignée de Wind River, film qui sera réalisé en 2017 par Taylor Sheridan, le scénariste. Autre film dans lequel une attention particulière est portée sur l’esthétique du film et sur l’histoire des luttes entre occidentaux et amérindiens. Comancheria ne fait toutefois pas l’erreur de tomber dans la moralisation à outrance en omettant de proposer un véritable bon film.
David Mackenzie, accompagné de Taylor Sheridan, ont proposé, en réalisant Comancheria, un film efficace qui tient en haleine le spectateur pendant la centaine de minutes du long métrage. Ils ont su s’entourer d’acteurs talentueux et de les encadrer dans une mise en scène et une écriture captivante.
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